Après le retrait de Siemens, avis de tempête pour AREVA

Position des syndicats CGT du Groupe
lundi 16 février 2009
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Depuis l’annonce surprise de la sortie de Siemens de la filiale AREVA-NP fin janvier 2009, chaque jour voit son lot d’annonces médiatiques, engendrant bien des incertitudes sur le devenir du Groupe AREVA et de ses 76 000 salariés. Cette nouvelle est perçue comme un coup de tonnerre, vient en fait complexifier, amplifier et accélérer les besoins en ressources financières vitales pour AREVA tant pour son développement national qu’international.

Au rythme des investissements nécessaires à la croissance du Groupe AREVA, les ressources financières et l’endettement actuels vont rapidement en limiter son développement. AREVA bénéficie pourtant d’un carnet de commandes très important et diversifié, à l’inverse de beaucoup d’entreprises dans la conjoncture actuelle. Dans quelques semaines, voire dans les mois à venir, des décisions lourdes de conséquences seront prises et conditionneront irrémédiablement l’avenir d’AREVA et de ses salariés.

L’heure est donc à la mobilisation de tous face aux menaces plausibles qui sont de trois ordres :

• un démantèlement du modèle intégré actuel d’AREVA où AREVA NC et/ou AREVA NP seraient cédées ou soustraites = fin de l’avance compétitive du modèle AREVA
• un scénario de fusion ALSTOM/AREVA impliquant de fait une privatisation directe = un marché de dupes sans synergies industrielles
• une cession d’AREVA TD et de ses 35 000 salariés au profit de son ancien propriétaire = retour à la privatisation des profits…

La sortie de Siemens un coup tordu prémédité, avec des conséquences lourdes

Cette annonce faite par un simple courriel de Siemens à l’attention d’A. Lauvergeon, avant sa grande médiatisation, nous a également surpris. Comment imaginer un instant qu’un tel événement n’a pas fait l’objet d’informations et de négociations préalables au niveau d’A. Merkel et N. Sarkozy. Nous pensons même que la Présidente d’AREVA, a été purement et simplement shuntée de ces discussions de palais. Depuis cette annonce, notre « omniPrésident » de la République fait preuve du plus grand mutisme, ce qui n’est pourtant pas dans ses habitudes. Aucun commentaire public sur cette affaire, ne lui est attribué. Face à de tels faits, nous pensons qu’un scénario a été minutieusement et patiemment concocté et a fait l’objet d’un deal préalable, ce qui lui permet de transformer « une mauvaise nouvelle » en une opportunité positive ainsi qu’il s’en est exclamé lors de son déplacement à Flamanville. Le « mariage » ALSTOM/AREVA devient « possible » devant la commission européenne, ce qui était interdit du fait de la présence de SIEMENS et que Bruxelles réfutait pour des raisons de concurrence en raison des similitudes de métiers entre ALSTOM et SIEMENS qui auraient été de fait associés à travers ce montage.
Siemens aurait proposé à plusieurs reprises depuis plusieurs années de faire évoluer sa participation dans AREVA NP et/ou dans AREVA et donc en aurait permis l’augmentation du capital. L’Etat Français, actionnaire principal d’AREVA, l’aurait refusé à chaque fois. L’Allemagne a fait l’objet de critiques virulentes et répétées, de la part du locataire de l’Elysée, sur plusieurs sujets dont le nucléaire en particulier. Une telle attitude n’a pu que contribuer à la situation actuelle.

Pour AREVA et ses salariés c’est une mauvaise nouvelle dont les conséquences sont incalculables et imprévisibles. Cet événement met fin à une coopération positive avec Siemens pour le réacteur EPR et démontre un échec cuisant de la coopération industrielle entre deux pays de l’Union Européenne. Pire, cela va favoriser la création d’un concurrent direct d’AREVA, le russe ATOMENERGOPROM, qui prochainement allié avec Siemens en retirera les savoirs, la notoriété et le capital.
En conséquence, c’est une facture supplémentaire de plus de 2 milliards d’euros qu’AREVA devra régler quasi immédiatement à Siemens. Elle s’ajoute aux difficultés de financement des investissements pour 2009 et les années à venir.

Statu quo sur les investissements, une onde de choc à Tricastin, La Hague, en Bourgogne… et 20 000 emplois menacés en France.

Le 18 décembre 2008, au Conseil de Surveillance d’AREVA, le budget opérationnel et le budget des investissements pour l’année 2009 ont été retoqués faute de financements suffisants, une première pour AREVA. Pourtant, ces investissements sont conformes au Plan Stratégique actuel d’AREVA que la CGT avait voté favorablement avec les autres conseillers. Aucune des personnes qualifiées du conseil ne pouvait se montrer surprise, en toute connaissance de cause, des capacités réelles de financements d’AREVA.
Le 5 février 2009 lors du Conseil de Surveillance, le budget opérationnel a été voté, cette fois-ci à l’exception de la CGT qui si y est opposée. Nous refusions de voter un budget d’exploitation sans qu’y soit associé celui des investissements. D’autant que ce budget d’exploitation réclame une augmentation significative de la profitabilité et impose des réductions de coûts arbitraires dont les salariés subiront les conséquences.
Où en est-on à ce jour ? C’est le flou total sur les investissements. Cette situation de blocage ne peut évoluer qu’à condition d’apporter des solutions concrètes de financements. Nous craignons que ceux-ci soient remis en cause partiellement, totalement ou différés. Pourtant ces centaines de millions d’euros d’investissements sont indispensables pour sécuriser les outils de production tels qu’à La Hague, à Comurhex, à GBII, en Bourgogne, etc… et à maintenir l’outil industriel GBI.
Au total, ce sont près de 3 milliards d’euros d’investissements qui sont laissés en jachère par l’impéritie des d’actionnaires d’AREVA, notamment de l’Etat Français, en n’apportant pas les capitaux propres nécessaires à leurs financements. C’est un véritable scandale qui se joue et que la CGT dénonce. L’Etat ne peut tenir un discours sur la relance en appuyant sur le frein.

La vampirisation, de 80% des résultats, opérée par l’Etat actionnaire qui n’en redistribue que peu au CEA depuis l’origine du groupe, au détriment notamment des investissements a toujours été dénoncée par la CGT d’AREVA et du CEA.

La CGT exige :

• Les actionnaires actuels d’AREVA doivent assumer leurs devoirs d’actionnaires en apportant les capitaux nécessaires au développement d’AREVA.

• Les investissements prévus dans le cadre du Plan d’Action Stratégique d’AREVA doivent être réalisés en totalité conformément au déploiement prévu.

• De maintenir le caractère public d’Areva

La CGT refuse :

• la fusion ALSTOM/AREVA* : car cela n’offrirait qu’un effet de taille, sans réelle synergie industrielle et sans apport de capital supplémentaire. Les électriciens mondiaux veulent rester libres de leurs choix d’équipements et choisir le turbinier ou le contrôle commande. Cela entraînerait une privatisation directe d’AREVA ou d’un de ses secteurs au profit d’une entreprise privée sans appel d’offre préalable. La valorisation d’AREVA difficile à déterminer permettrait un bradage des deniers publics. De plus, dans un tel cas c’est à terme 10 à 15% des effectifs qui seront supprimés (sièges, agences à l’étranger, emplois manufacturiers) soit de l’ordre de 10 à 15 000 emplois.

• le démantèlement d’AREVA : AREVA doit conserver son modèle intégré y compris AREVA TD. Non à un nouveau capital composé de BOUYGUES - Etat minoritaire - large flottant en bourse.

  • Pour beaucoup ces projets de mariage relèveraient plutôt d’un pur copinage entre les amis du Président de la République tels que Martin BOUYGUES et Patrick KRON au détriment des intérêts d’AREVA et des deniers publics.